La gestion de risque et le « money management » sont des concepts souvent associés au trading car ils font la différence entre un trader rentable et un trader ruiné. L’investissement de façon plus générale est une activité hautement émotionnelle, propice aux biais psychologiques qui nuisent à la performance. Une approche quantitative du risque peut aider à augmenter les chances de succès. Ces éléments doivent être intégrés dans votre plan de trading et absolument respectés.

Voyons pour commencer quelques notions utiles.
Rentabilité d’une stratégie
C’est le gain net total réalisé par rapport au capital engagé. Elle peut s’exprimer en valeur absolue (€) ou en pourcentage (% de retour sur investissement).
Rentabilité = (Gain total – Perte totale) / Capital initial.
Si une stratégie réalise 2000 € de gains pour un capital de 10 000 €, sa rentabilité est de 20 %.
Taux de réussite ou Win Rate d’une stratégie
C’est le pourcentage de trades gagnants sur l’ensemble des trades.
Taux de réussite (Win Rate) = (Nombre de trades gagnants / Total des trades) × 100.
Si une stratégie a obtenu 70 trades gagnants sur 100, son win rate est 70 %.
Rapport risque/rendement d’une stratégie (ou Risk/Reward Ratio ou R:R)
Le R:R mesure combien vous risquez (perte potentielle moyenne) pour chaque unité de gain (gain potentiel moyen).
R:R = Risk/reward = Perte moyenne par trade perdant / Perte moyenne par trade perdant
Relation entre le Win Rate et le R:R
Win Rate et R:R sont donc des éléments cruciaux dans l’évaluation d’une stratégie d’investissement, car ils définissent sa rentabilité et la stratégie de gestion de risque à mettre en place, Les traders aiment avoir des R:R élevés > 1:3, car ils peuvent subir beaucoup de pertes et espérer être malgré tout rentables.
gain théorique en fonction du R:R et du WR :
R:R → WR ↓ | 2:1 | 1:1 | 1:2 | 1:3 |
30% | -0,55 | -0,4 | -0,1 | 0,2 |
40% | -0,4 | -0,2 | 0,2 | 0,6 |
50% | -0,25 | 0 | 0,5 | 1 |
60% | -0,1 | 0,2 | 0,8 | 1,4 |
70% | 0,05 | 0,4 | 1,1 | 1,8 |
Un Win Rate de 50 % avec un R:R de 1:2 donne +0.50 de gain moyen par trade : c’est rentable.
Une stratégie avec 30 % de trades gagnants peut rester profitable si le R:R ≥ 3.
Série de pertes consécutives ou Losing Streak
Même une stratégie gagnante connaitra des séries de trades perdants.
nombre de pertes consécutives probables en fonction du Win Rate :
WR → Trades ↓ | 40% | 50% | 60% | 70% | 80% | 90% |
100 | 9,0 | 6,6 | 5,0 | 3,8 | 2,9 | 2,0 |
500 | 12,2 | 9,0 | 6,8 | 5,2 | 3,9 | 2,7 |
1000 | 13,5 | 10,0 | 7,5 | 5,7 | 4,3 | 3,0 |
Même avec un win rate de 70 %, il est probable (en fait à 61% probable) de rencontrer 5,2 trades perdants d’affilée sur 500 trades. Il y a même 3% de chance de rencontrer 8 trades perdants d’affilé.
En fonction du risque par position on voit donc que le risque perdre tout son capital sur une série malchanceuse de trades perdants est bien réel.
Risque par position
C’est le montant que vous êtes prêt à perdre sur un trade qui tourne mal. Ce risque est en général gérer avec un stop loss. Vous devez définir le stop loss lors de l’évaluation de votre stratégie.
La formule suivante permet alors de calculer la taille de la position :
Taille de la position = Risque max par trade × Capital / Distance au stop
Exemple :
- Capital = 10 000 €
- Risque max toléré = 2% du capital
- Stop loss = 10%
- Position autorisée sur un trade = 0,02 * 10000/ 0,1 = 2000 €
Il est en général conseillé de ne pas dépasser 2% de risque par position.
Risque de ruine
Tout les concepts vus précédemment s’associent pour définir l’élément essentiel = le risque de ruine. C’est à dire la probabilité mathématique de perdre tout de son capital et de ne plus être en mesure de trader, sur une série de trades perdants. Si un trader risque trop par trade (ex. 10 % du capital), une série de pertes peut rapidement mener à une destruction totale du portefeuille.
C’est cette probabilité que l’on souhaite maitriser à travers une bonne gestion de risque.
Le risque de ruine est influencé par :
- La fréquence des pertes (win rate).
- Leur ampleur (R:R).
- La taille des positions par rapport au capital total.
- La corrélation entre les stratégies utilisées.
La méthode de Kelly permet de calculer l’a taille de position en fonction de ces paramètres :
Fraction du capital à risquer sur un trade = ((R:R * WR) – (1 – Win Rate))/ (R:R)
Cependant cette formule a été défini pour optimiser les gains, pas pour limiter les risque des ruine, et je la trouve trop optimiste (dangeureuse).
Voyons maintenant les éléments de gestion de risque que j’utilise dans mes stratégies
L’avantage statistique : le préalable
L’un des premiers objectifs de l’analyse quantitative est de s’assurer que vos stratégies possèdent un avantage statistique. Cela signifie que vos stratégies doivent être rentables sur le long terme. Les backtests visent à vérifier cette rentabilité en testant les stratégies sur des données historiques. Ils permettent de s’assurer que les stratégies ont été rentables par le passé et le resteront probablement à l’avenir.
La diversification : réduire le risque du portefeuille
La diversification du portefeuille permet de réduire le risque sans sacrifier le rendement. C’est pourquoi Harry Markowitz, un économiste américain et lauréat du prix Nobel, disait que la diversification est « the only true free lunch in investing » (la seule véritable aubaine gratuite en investissement).
Cette diversification se fait classiquement en composant son portefeuille avec des classes d’actifs peu corrélées. En effet, différents actifs réagissent généralement différemment aux mêmes événements économiques. Par exemple, si une action chute, d’autres actifs comme les obligations ou l’immobilier peuvent ne pas être affectés de la même manière.
Mais ce n’est pas l’unique façon de diversifier vos investissement. En tant qu’investisseur quantitatif, il s’agit de trouver des stratégies quantitatives aux résultats décorrélés. En pratique, vous pouvez chercher un ensemble de stratégies qui combine :
- différentes classes d’actifs (actions, obligations, matière premières, etc.);
- des positions simultanément à l’achat et à la vente;
- des positions à court et moyen terme;
- des indicateurs fondamentaux et techniques.
Vous pouvez calculer une matrice de corrélation de vos stratégies. Mais beaucoup plus simplement, je préfère vérifier visuellement que les courbes de performance dans le temps de mes stratégies ne fluctuent pas de la même manière, que quand une stratégie sous performe (en marché baissier par exemple) une autre vient la compenser.
Les Stop-Loss : caper le risque par position
Les ordres stop-loss sont des outils cruciaux pour limiter les pertes potentielles sur chaque position. Ils permettent de fixer à priori le risque que vous êtes prêt à prendre sur chaque opération.
Le stop est souvent vu comme le moyen de créer une asymétrie favorable entre l’espérance de gains et le risque de perte en coupant les pertes. Dans la pratique, mes backtests ne montrent pas vraiment d’efficacité des stop loss dans dans l’amélioration de la performance. Par contre, ils permettent de normaliser les pertes et d’éviter des pertes exceptionnelles qui viendraient ruiner la performance statistique d’une stratégie. C’est particulièrement vrai sur les stratégies vendeuses où un short squeeze, toujours possible, fait peser le risque d’une perte illimitée.
Les stops loss sont particulièrement fiables sur les stratégies intraday. Dès qu’une stratégie a un échéance plus longue, le risque d’un mouvement des cours pendant la nuit peut déclencher l’exécution du stop loss à un cours bien plus défavorable que ce qui était prévu. Certains courtiers proposent néanmoins des stop loss garantis qui vous garantissent le cours d’exécution même en cas de fort décalage des cours.
Dans la pratique, en fonction des résultats de mes backtests, je place souvent mes stop loss à -10% du cours d’entrée, pour limiter l’impact des trades fortement perdants et pour quantifier le risque par position.
Adapter la taille des positions
La taille des positions doit être adaptée en fonction des règles de money management, mais aussi en tenant compte de la liquidité et de la volatilité de l’actif sur lequel vous tradez. Une gestion efficace de la taille des positions permet de maximiser les gains tout en minimisant les risques.
Je définie une taille de position pour chacune de mes stratégie. Je pars d’un risque à 2% de mon capital. Mais j’adapte la taille en fonction de quelques critères.
- position peu liquide : j’adapte ma position si la liquidité du sous jacent est faible (j’interviens souvent sur des small caps)
- position overnight : si je maintiens une position si une ou plusieurs nuits, je divise la position par 2 (car les stop loss ne me protègent pas complètement)
- Win Rate : pour des win rates de 60% ma position de base est de 2% (mais de 3% pour un WR de 80% et de 1% pour un WR de 50%)
Ce ne sont que mes préférences, pas des préconisations. Chacun doit prendre des tailles de positions avec lesquelles il est à l’aise, en comprenant bien que plus la taille des positions est élevée, plus le risque de ruine est grand. De plus, ce éléments sont probabilistes, même avec des tailles réduites (comme 1% du capital) il reste possible de tout perdre sur une série de pertes improbable.
Suivi des stratégies : s’assurer de la performance réelle
Un suivi mensuel de l’exécution des stratégies permet de s’assurer que la performance réelle correspond bien à la performance théorique. Si ce n’est pas le cas, il est nécessaire de revoir la stratégie d’exécution. Cela permet également de vérifier si la stratégie est toujours rentable et d’ajuster ou de désactiver les stratégies non rentables. Les modèles quantitatifs sont basés sur l’historique des données, mais les conditions de marché évoluent, il est donc crucial d’adapter les stratégies aux nouvelles conditions.
Pertes hebdomadaires : le garde fou
Si la valeur de votre portefeuille baisse de plus de 15%,je préfère réduire le risque par opération. Si la baisse dépasse 20%, j’arrête toutes les stratégies non rentables et de comprendre ce qui s’est passé. Un suivi rigoureux des pertes hebdomadaires permet de protéger votre capital et d’éviter des pertes importantes.
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